• Réforme de la voie pro 2018: DES LYCÉES PROFESSIONNELS FRAGILISÉS

    DES LYCÉES PROFESSIONNELS FRAGILISÉS

    Réforme de la voie professionnelle
    Premier regard sur les mesures annoncées le 28 mai 2018

    La réforme annoncée ce lundi 28 mai par le ministre est dans la suite logique de la généralisation du bac pro 3 ans lancée il y a 10 ans. Elle est idéologique et budgétaire. Idéologique car elle contribue au transfert de la formation professionnelle initiale vers les branches professionnelles et le patronat. Budgétaire car elle diminue le temps de formation et les heures d’enseignements. A travers elle, c’est une nouvelle baisse des savoirs et des savoir-faire qui se profile. 

    MOINS D’HEURES POUR PLUS DE DISPOSITIFS

    Lors de sa conférence de presse, le ministre s’est bien gardé de parler des grilles horaires envisagées pour les bacs pros et les CAP. Dans ces projets, les élèves auront de 3 à 4 heures de cours en moins par semaine et des dispositifs de co-intervention (Français/maths en enseignement professionnel) ou de projets sont imposés. Les heures non disciplinaires passent à 3,5 heures de consolidation, d’accompagnement personnalisé et de préparation à l’orientation.
    Avec une baisse de plus de 10 % des horaires, l’équivalent de plus de 6 000 postes peut être supprimé d’ici la fin du quinquennat. Comme il y a 10 ans avec la généralisation du bac pro en 3 ans, la transformation est abordée par la question des moyens avant toute réflexion ou détermination des contenus et objectifs de formation. Inutile d’avoir attendu la fin mai pour annoncer de telles économies.

    UNE FORMATION À NOUVEAU RÉDUITE

    Le ministre reprend la préconisation du rapport Calvez-Marcon sur la création de 2des à famille de métiers, justifiée alors par la volonté de repousser le palier d’orientation des jeunes et par une soi-disant amélioration de la lisibilité des filières. Il s’agit d’en faire des classes propédeutiques à l’apprentissage (les contrats de trois ans rebutant les patrons) et d’améliorer les indicateurs d’orientation en sortie de 3ème. Les jeunes choisiront leur spécialisation et le mode de formation (scolaire ou apprentissage), encore faut-il qu’il y ait de la place.
    Une quinzaine de familles sont envisagées. Celle de la relation client regrouperait les bac pro vente, commerce et ARCU, une autre rassemblerait GA, le transport, la logistique et la sécurité. De telles 2des ont déjà été expérimentées, faisant preuve de leur non pertinence.
    La conséquence de ces classes est une déprofessionnalisation de l’enseignement. Savoirs et savoir-faire sont réduits. Après le passage du bac pro 4 ans au bac pro 3 ans, c’est un bac pro 2 ans que propose le ministre. C’est uniquement dans le cadre d’un parcours en 4 ans vers le bac pro que des 2des professionnelles de détermination pourraient être pertinentes.

    CAP 1, 2 OU 3 ANS : SANS MOYENS SUPPLÉMENTAIRES

    Après le mixage des publics et des parcours, le ministère propose d’instaurer le mixage des temps de formation en CAP. Les jeunes préparant un CAP en 1, 2 ou 3 ans se retrouveraient dans le même groupe classe. Pédagogiquement intenable, cette mesure illustre encore l’objectif d’économie de moyens. Pour le SNUEP-FSU, les structures de formation en 1, 2 ou 3 ans doivent être distinctes, les progressions pédagogiques étant nécessairement différentes. Cela nécessite des postes supplémentaires que le ministère refuse de déployer. Ce sont les élèves de CAP et les professeurs de lycée professionnel qui vont en pâtir.

    DE LA 3ème PEP à la 3ème « prépa métiers »

    Le changement de nom s’accompagne d’une augmentation du nombre de stages en entreprise. Les discussions de l’automne permettront de savoir si l’organisation de cette classe sera davantage touchée.

    ÉPREUVES ANTICIPÉES POUR LE BAC PRO

    Le diplôme intermédiaire est conservé. Les épreuves seront passées en fin de première comme épreuve anticipée du bac pro. C’est une avancée qui permet de réduire la pression certificative, ce qui est une demande du SNUEP-FSU. Reste à voir comment le ministère compte mettre en place ces épreuves anticipées.

    CAMPUS D’EXCELLENCE

    Emballage cadeaux pour une coquille vide, les campus d’excellence ne sont qu’un outil de communication du ministre. En réalité seuls quelques établissements sont concernés (moins de 100 élèves concernés en CAP et bac pro) par les campus, alors que les 1500 lycées pros subissent la baisse de la taxe d’apprentissage et le sous-investissement des régions.

    DE L’APPRENTISSAGE DANS TOUS LES LP

    Annonce non surprenante pour « sécuriser les transitions » selon le ministre. L’implantation de sections d’apprenti·es en LP est synonyme de mixité des publics et de parcours. La pertinence pédagogique est loin d’être démontrée, bien au contraire. Expérimentée depuis plusieurs années, rien ne plaide pour sa généralisation. Au lieu d’une sécurisation, c’est la désorganisation des LP et la fragilisation des parcours des jeunes que le ministre développe.

    CLASSES PASSERELLES VERS LE BTS

    Ces classes restent à définir (accès, contenu etc.). L’annonce est faite sans concertation préalable au moment où beaucoup de jeunes ont des réponses négatives sur Parcoursup. Si une année supplémentaire est nécessaire, la pertinence d’un retour au bac pro en 4 ans doit plutôt être questionnée.

    BAC PRO GESTION ADMINISTRATION
    La réduction de l’offre de formation est actée. Des sections entières vont être fermées sans qu’aucune solution n’ait été réellement envisagée pour les jeunes qui souhaiteraient s’y orienter ou pour les personnels qui y exercent. Près de 1500 professeurs de lycée professionnel vont être concernés. Le ministère parle de mobilité de carrière (changement de discipline ou de fonction entre autres) sans pour autant mettre les moyens nécessaires. Le SNUEP-FSU demande la mise en place rapide de solutions sérieuses et respectueuses des professeurs, des équipes pédagogiques et des jeunes.

    Pour le SNUEP-FSU, ce projet ministériel, dans la continuité des modifications prévues pour l’apprentissage, fragilise davantage l’enseignement professionnel. Alors qu’il communique sur une valorisation de la formation professionnelle, le ministre s’apprête, avec ses mesures, à détruire l’enseignement professionnel public. Le SNUEP-FSU ne peut accepter cette marche en avant vers la destruction de nos lycées pros.