• La Voie Pro écrasée par le Snetaa-FO et l'IUMM! Nous savons d'où nous venons , nous savons où nous sommes: à la FSU!Au SNUEP-FSU!

    Les 10 ans de la généralisation du bac pro 3 ans…

     

    Cet article est le fruit d’un travail collectif de l’équipe du SNUEP-Bordeaux

     

     

     

    La scène se déroule le 6 février 1993 à Paris. Une nouvelle association voit le jour : « Créateurs d’école », initiée par le directeur de cabinet du ministre Bayrou et qui compte parmi ses adhérents de nombreux inspecteurs généraux (dont Xavier Darcos, IGEN), des chefs d’établissement, des enseignants d’université… : « Créateurs d’école » s’inspirait des établissements privés confessionnels sous contrat pour défendre un établissement autonome fondé sur le modèle d’une entreprise privée. L’association publie un premier ouvrage « Les verrous à faire sauter » dans lequel il est écrit : « Il ne nous faudra pas tomber dans le piège de la réforme globale…la solution réside dans la mise en œuvre de dispositifs transitoires. » Ecole et laïcité (2004) Ce 6 février 1993, un invité de marque à cette première réunion : Dominique de Calan, directeur adjoint de l’IUMM et spécialiste de la formation professionnelle. Ne perdez pas de vue ces noms-là, on va bientôt les retrouver car ils sont au cœur de ce qui suit !

     

    « Dispositifs transitoires, expérimentations, réformes », on connaît bien ce vocabulaire dans l’éducation. Cela devrait nous amener à être toujours extrêmement vigilants quand il est utilisé. Pourtant, cela ne sera pas le cas pour certains dans l’histoire qui va suivre et qui concerne plusieurs centaines de milliers d’élèves et plusieurs milliers de PLP. C’est celle de la généralisation du bac pro 3 ans dans l’enseignement professionnel. C’est en décembre 2007, le 17, que tout a basculé : sans qu’aucun bilan n’ait été tiré et sans écouter les avis des pédagogues, un communiqué ministériel annonce que 4 syndicats de l’éducation, le Snetaa-eil- le Sgen-cfdt- l’Unsa-éducation- le Snalc-csen, acceptent de signer le lendemain « un protocole de discussion sur l’organisation du bac professionnel en 3 ans ». C’est un véritable choc dans la sphère éducative car si tout prédisait que le ministre Darcos voulait à tout prix de cette « réforme » afin d’économiser des postes d’enseignants tel que le voulait Sarkozy, rien ne laissait présager que 3 syndicats se laisseraient entraîner aussi facilement dans le piège. C’est pourquoi il nous paraît important, 10 ans après, d’analyser les tenants et les aboutissants de cette « réforme », d’autant plus que nombre d’entre-nous étions, dans l’académie de Bordeaux, en première ligne de l’action de résistance.

     

    1- Aux origines du Bac pro 3 ans :

     

    Dès janvier 2000, le Snetaa (ironie de l’histoire, on le verra plus loin), majoritaire chez les PLP, évoque ce bac pro en 3 ans : « Traditionnellement hostile au BEP, le MEDEF et l'UIMM ont demandé au Ministère des dérogations à la réglementation du Baccalauréat Professionnel pour pouvoir préparer en 3 ans au Baccalauréat Professionnel dans les CFA, des élèves de bon niveau, ne possédant pas le BEP. Le Ministère envisage dans le même registre le transfert de cette dérogation aux établissements d'enseignement public dont plusieurs seraient autorisés "à titre expérimental" à instaurer une voie directe d'accès en 3 ans au baccalauréat professionnel. Les choix effectués par l'UIMM conduiraient ainsi par ricochet à une remise en cause de la voie professionnelle BEP-Bac Pro dans le service public d'éducation (Bonjour la laïcité !!). Le Bureau National du SNETAA s'est prononcé à l'unanimité pour un refus ferme et déterminé des personnels. » EP n° 100 (10/01/2000)

     

    Le 13 décembre 2000, une « Convention générale de coopération entre le Ministère de l’Éducation Nationale, l’Union des industries métallurgiques et minières (UIMM) et l’organisme paritaire collecteur agrée des industries métallurgiques (OPCAIM), confirme l’expérimentation du bac pro 3 ans. Elle est co-signée pour une durée de 5 ans par Jack Lang (ministre de l’EN), Jean-Luc Mélenchon (ministre délégué à l’enseignement pro), Denis Gauthier-Sauvagnac (vice-président de l’IUMM) Dominique de Calan (directeur de l’OPCAIM) et Marc Perret (vice-président de l’OPCAIM) !

     

    L’article 7 de cette convention stipule : « Une réflexion est menée conjointement entre le ministère de l’éducation nationale et l'UIMM, avec pour objectif d’organiser des formations qualifiantes individualisées, quel qu’en soit le niveau. A ce titre, des expérimentations sont mises en place et permettent l’organisation de parcours diversifiés pour tous les diplômes relevant des spécialités de la 3ème CPC et notamment les baccalauréats professionnels. » En effet, le patronat se détourne des CAP et BEP et veut que les jeunes soient plus rapidement « employables ».

     

    Suite à cette convention, les choses ne tardent pas : à la rentrée 2001, 4 bac pro industriels passent ainsi en expérimentation sur 3 ans (ceux qu’aiment bien l’IUMM dans ses CFA…) : MSMA, TU, EIE, ROC SM. L’IUMM avec son CFAI est en première ligne avec 300 apprentis mais cela concerne aussi 1300 élèves. Les personnels et leurs syndicats sont de plus en plus inquiets. Le Snetaa d’alors (il variera beaucoup par la suite…) intente même une action juridique, fin 2002, contre la généralisation du bac pro 3 ans. Mais, à la rentrée 2004, le ministère fait le forcing et ce sont des dizaines de sections qui s’ouvrent dans toute la France (159 dont 8 dans l’académie de Bordeaux). Fin 2004, le projet de loi d’orientation sur l’avenir de l’école évoque alors un bac pro 3 ans « généralisé pour tous ceux qui le souhaitent (sic) ». Tout naturellement, ces expérimentations donnent lieu, en septembre 2005, à un rapport de l’Inspection générale. Celui-ci est on ne peut plus précis sur les problèmes rencontrés :

     

    « Si le bac professionnel en trois ans constitue une première réponse à la flexibilité des parcours, ce dispositif n’y répond que partiellement et de manière trop rigide. En effet, il est nécessaire de donner une réponse adaptée à la diversité des publics accueillis en baccalauréat professionnel. Le parcours en trois ans n’est donc qu’un élément de réponse qui ne concerne qu’une faible partie des publics.

     

    Au-delà de la spécificité de cette expérimentation dont les résultats peuvent être très positifs, il y a lieu de souligner que les objectifs de formation des diplômes professionnels sont clairement établis par les référentiels, ainsi que leurs modalités de certification. A ce titre il faudrait laisser davantage d’initiative aux établissements pour adapter les parcours en fonction des publics, plutôt que d’imposer une seule alternative : le bac pro en quatre ans ou le bac pro en trois ans. Ainsi, dans chaque établissement pourraient être organisés des parcours différenciés pendant, un trimestre, un semestre, une année, deux, trois ou quatre années selon les besoins, afin d’amener chacun à la réussite au rythme le plus adapté. Enfin, il y a lieu encore de souligner qu’une grande majorité d’élèves ne peut pas suivre un parcours vers un baccalauréat professionnel en trois ans au terme du collège et à ce titre ils ne doivent pas être oubliés.»

     

    L’IGEN ne se permet pas bien sûr de demander de mettre fin à cette « réforme » mais les mises en garde sont précises quant aux dangers d’un bac pro en 3 ans pour une majorité d’élèves ! Le ministère n’en a cure : le 29 décembre 2006, cinq ans après la 1ère, une nouvelle convention cadre voit le jour entre l’EN et l’IUMM où l’on retrouve les mêmes signataires, mis à part les ministres qui ont changé de bord. En voici un extrait paru dans le BOEN du 14 juin 2007 : « Pour les diplômes de l'enseignement technologique et professionnel relevant de son secteur, les recteurs et les UIMM territoriales adhérentes à l'UIMM se concertent, dans le cadre de la préparation du plan régional de développement des formations professionnelles des jeunes et de ses conventions annuelles d'application sur : - l’évolution de la carte scolaire ; - l’ensemble des formations préparées par la voie  de l’apprentissage ; - le développement de parcours de formation individualisés à durée variable, notamment pour les jeunes préparant, sous statut scolaire ou apprentissage, le baccalauréat professionnel en 3 ans ou en 1 an après le bac général ou un BTS…» Et pour l’anecdote, est défini aussi le rôle des professeurs associés : « L'UIMM et le ministère chargé de l'éducation nationale recherchent les modalités permettant de développer la participation de professionnels à l'enseignement professionnel dispensé dans les établissements scolaires. » C’est confirmé : l’IUMM à la mainmise sur l’EPP et la formation professionnelle en France !

     

    2- Mais qui est l’IUMM ? 

     

    Créée en 1901, faisant suite au Comité des Forges, c’est l’une des plus anciennes confédérations syndicales patronales de France. Son implication et ses activités de lobbying dans la politique au niveau national et européen sont importantes. Et c’est dans le domaine de l’éducation qu’elle cherchera à être très influente, organisant séminaires et colloques « avec repas pantagruéliques » pour enseignants, chefs d’établissements, inspecteurs (à Saint Malo en 1994, au Mont Saint Michel en 1996…). Dominique de Calan y est toujours présent. Une enseignante témoigne : « De Calan nous a expliqué que nous devions habituer nos élèves à l’idée qu’un tiers d’entre eux resteront sur le carreau…L’IUMM occupait le terrain pour diffuser son idéologie. Il fallait éduquer les élèves à obéir, ne pas trop développer leur esprit critique… » Histoire secrète du patronat (Collombat et Servenay) Parallèlement, l’IUMM mène des campagnes conjointes de promotion avec l’EN sur…l’apprentissage : « Un travail de lobbying qui porte ses fruits au niveau législatif. Ainsi, la loi Seguin qui élargit le champ d’application de l’apprentissage salarié à tous les diplômes professionnels est « une loi entièrement faite par l’IUMM » nous explique Dominique de Calan avant de nous donner le mode d’emploi de ce lobbying réussi : « D’abord, atténuer les opposants. On a minimisé le risque vis-à-vis des enseignants. » Histoire secrète du patronat Mais c’est en septembre et octobre 2007 que l’IUMM fait les gros titres de la presse avec des révélations sur l’existence d’une caisse noire de plusieurs centaines de millions d’euros. Ce trésor de guerre aurait particulièrement servi à des financements de partis politiques et à des organisations étudiantes d’extrême droite…Pour cette affaire, Denis Gauthier-Sauvagnac sera condamné en appel à deux ans de la prison avec sursis et Dominique de Calan à 50000 euros d’amende !

     

    En 2007, tout le monde est donc au courant du pouvoir et des visées de l’IUMM !

     

    2- De l’expérimentation à la généralisation

     

    2007 : année charnière. Xavier Darcos est nommé ministre de l’EN sous la présidence Sarkozy. Sa feuille de route : supprimer des postes et mettre en œuvre les politiques souhaitées par « Créateurs d’école » et par l’IUMM. Dès le 22 octobre, un rapport du Sénat sur la loi de finances 2008 nous met la puce à l’oreille : « Votre rapporteure juge prématurée la décision de généraliser le baccalauréat professionnel en trois ans. Il apparaît peu pertinent à votre rapporteure de vouloir généraliser le baccalauréat professionnel en trois ans… Il serait plus pertinent de proposer ce cursus dans les filières où il se justifie, sans chercher à l'imposer dans des voies où le BEP et le CAP ont toute leur place.» Et pourtant, ce qui devait arriver arriva : le 29 octobre 2007, sans aucune concertation et dans une note adressée aux recteurs et vice-recteurs, Xavier Darcos exige la fin de l’expérimentation du bac pro en 3 ans : « La généralisation du parcours en trois ans doit être résolument engagée et, dès la rentrée 2008, 45.000 élèves devront être accueillis dans des formations préparant en trois ans au baccalauréat professionnel, ce qui équivaut à environ 25 % des effectifs actuels entrant en BEP ».

     

    A partir de ce jour-là, racontons de l’intérieur la suite des événements, certains d’entre-nous étant depuis longtemps au SNUEP, d’autres étant encore adhérents du SNETAA à l’époque. Rapidement, pour les uns comme pour les autres, confrontés à ce passage en force, la résistance s’organise au niveau national et dans les académies. Dès le 14 novembre, une manifestation unitaire contre la généralisation du Bac Pro 3 ans a lieu devant le rectorat de Bordeaux (snetaa-eil, cgt-éduc’action- se-unsa- snuep-fsu- sgen-cfdt- snes et snep-fsu- snfolc). Le 21 novembre, après un vote unanime du Conseil national contre le Bac pro 3 ans, le Snetaa publie un tract de 4 pages : « Non au Bac Pro 3 ans » EP n° 362. De son côté, le 27 novembre, le secrétariat du Snuep exprime sa totale opposition dans un communiqué de presse. Le 28 novembre, c’est au tour de l’Unsen-Cgt. Elèves et profs sont dans la rue. A Bordeaux, les manifs succèdent aux manifs. La tension est à son comble. Le 14 décembre, dans une dépêche AEF (n° 88647), le ministère n’en démord pas : « Il est hors de question de suspendre quoi que ce soit », le calendrier est maintenu : « la généralisation du bac pro 3 ans sera effective à la rentrée 2009, il n’est pas question de ralentir le rythme des réformes. En revanche, nous discuterons avec les syndicats des modalités ». La colère redouble : le 17 décembre, Sud-éducation recense des manifestations intersyndicales dans ¾ des académies…Pourtant ce 17 décembre 2007 : jour funeste pour l’unité de l’action syndicale et la défense des intérêts de l’enseignement professionnel public. Comme souligné plus haut, 4 syndicats (Snetaa-eil, Se-unsa, Sgen-cfdt, Snalc-csen) signent, avec le ministère, un protocole de discussion sur la généralisation du bac pro 3 au moment même où leurs adhérents sont dans la rue (avec des milliers d’élèves) pour s’y opposer !!! Ce jour-là, pour ceux qui étaient au Snetaa, c’est une trahison par rapport aux élèves et aux personnels. Le malaise est profond.

     

    Dès lors, le ministère fera semblant de négocier (des modalités…) et promettra monts et merveilles à ces 4 syndicats : rénovation de la voie professionnelle, baisse des sorties sans qualification, développement du nombre de CAP, maintien du BEP, maintien d’un parcours en 4 ans pour les élèves qui en ont le plus besoin, renforcement des SEGPA, …La généralisation est repoussée d’un an mais l’expérimentation (sic) est fortement étendue dès 2008. Exactement les modalités qu’avait prévu le ministère ! Vous qui êtes dans nos LP/SEP/EREA/SEGPA, vous pouvez, 10 ans plus tard, conclure que les promesses n’engagent que ceux qui y croient…Il y a néanmoins quelques carottes : une indemnité pour les enseignants de terminale pro, une indemnité CCF et diverses indemnités pour les profs principaux. En résumé, comment acheter la paix sociale en s’asseyant sur l’intérêt des élèves…et sur les conditions de travail des profs !

     

    Les lycéens continueront d’agir avec de fortes mobilisations en janvier-février-mars 2008. L’intersyndicale, CGT- SNUEP- SUD- FO, mènera le combat jusqu’au bout avec notamment l’organisation de journées de grève en janvier 2008 et d’une semaine d’actions nationales en mars 2008. Mais le coup de grâce du cursus BEP - Bac Pro en 4 ans sera donné le 23 mai 2008 par la signature du protocole d’accord entre le ministère et 4 syndicats : 2 d’enseignants, le Snetaa et le Sgen et 2 de chefs d’établissement, le Snpden et ID-Faen. Le Se-Unsa et le Snalc ne le signeront pas !!! Le lendemain, le Café pédagogique écrira : « La mesure la plus « médiatique » est évidemment la transformation du bac Pro en trois ans, qui n’occupe qu’une ligne dans un texte de trois pages. » Embarquez, c’est pesé !

     

    3- Bilan et commentaires

     

    - Données brutes in Repères et références statistiques de l’EN:

     

    * Elèves en LP/SEP/EREA : 720.000 en 2007 / 665.000 en 2016.

     

    * Diplômes terminaux délivrés (par la voie scolaire):

     

    - 2007 : 100.200 Bac Pro / 2016 : 155.000 Bac pro

     

    * Pourcentages de réussite : 86,5 % en 2010 / 82,5 % en 2016

     

    * Evolution du nombre d’apprentis en bac pro: 39.820 en 2006 / 53.697 en 2015

     

    * Evolution postes PLP dans le public : 66.217 en 2007 / 55.797 en 2014.

     

    En termes statistiques, cette « rénovation » a effectivement permis d’augmenter le nombre de diplômés bac pro. Mais le constat est plus inquiétant quant à l’évolution générale des effectifs : le nombre d’élèves diminue (- 55000) pendant que le nombre d’apprentis s’accroît (+ 14000 en bac pro). Et le pourcentage de réussite baisse de 4 points. A noter aussi la suppression massive de postes de PLP. Le Secrétaire général du Snetaa reconnaît lui-même ces suppressions de postes : « Christian Lage, président du Snetaa-FO, avait soutenu la réforme à l’époque, mais est amer aujourd’hui : « Dans un contexte de rigueur budgétaire, la filière pro a servi de variable d’ajustement » ! Libération 12/10/2014

     

    Revenons donc aux origines. Si le bac pro 3 ans existe, c’est la résultante des de- mandes de l’IUMM, fortement encouragées par les gouvernements des années 2000-2010. D’abord, cela a réduit la formation et le cursus de progression d’un an et a donc favorisé les économies budgétaires et le développement du bac pro par apprentissage : « Il y a consensus pour reconnaître que la mise en place de filières de formation par apprentissage, sur la base de diplômes de l’Éducation nationale allant du CAP au Bac professionnel puis à l’enseignement supérieur, a créé un appel d’air favorable à l’apprentissage. La réduction de la durée de préparation du Bac professionnel de 4 à 3 ans a, selon les dires de très nombreux acteurs, amplifié cette tendance. » Le bac pro en 3 ans : une nouvelle donne pour l’apprentissage (Toutin- Cart)

     

    Mais le plus inquiétant, est le vécu des élèves et celui des enseignants : « La délivrance du bac pro se faisant déjà en partie par unités capitalisables, il paraît envisageable de rendre les parcours du bac pro plus flexibles pour laisser le temps aux élèves qui en ont besoin d’une année supplémentaire. Les enseignants que nous avons interrogés soulignent tous cette hétérogénéité des besoins de leurs élèves. Ils regrettent d’avoir à imposer aux plus fragiles un rythme trop contraignant, alors qu’ils sont satisfaits de pouvoir conduire plus rapidement les meilleurs vers le BTS…Dans un rapport précédent nous avions mis en évidence la surcharge de travail que la réforme avait entraînée pour les PLP : gestion plus difficile des stages en entreprises avec des élèves plus jeunes, mise en œuvre d’un suivi individualisé des élèves sans moyen supplémentaire, organisation de la certification intermédiaire en parallèle du cursus de la classe de première. Il semble donc que cette réforme devrait être l’occasion de repenser les obligations de services des enseignants de LP en tenant compte de la diversité des charges de travail qui pèse sur eux et en cessant de minorer la rémunération des tâches qui ne sont pas effectuées en classe et devant élèves. La logique qui consiste à considérer que le travail enseignant se réduit à la préparation des cours, à leur réalisation et à l’évaluation des élèves est aujourd’hui à l’évidence obsolète dans les LP. Les PLP enseignent, mais ils accompagnent aussi leurs élèves dans la connaissance et l’expérimentation d’un univers professionnel, ils assurent une évaluation continue de leur travail, ils leur délivrent un diplôme et ils tentent de répondre à l’hétérogénéité de leurs besoins. Une telle accumulation de tâches ne relève plus de la seule mesure comptable des cours effectués. » Rapport du Centre de recherche en éducation de Nantes sur le bac pro 3 ans (Vincent Troger)

     

    Pour conclure : « Les Assises de la formation professionnelle » organisées par l’AFDET le 12 novembre 2008 en présence de Darcos ont bien mis en évidence la méthode employée : « La généralisation pour la rentrée 2009 a été annoncée par une note du ministre, en octobre 2007, à la suite d’une expérimentation qui a concerné 4000 élèves…La décision a été prise sans débat préalable. Des discussions ont suivi entre les décideurs du système éducatif et ses partenaires sociaux, représentants de branches et syndicats d’enseignants, notamment. Mais, la société civile dans son ensemble – si cette expression peut être utilisée - a été peu associée. »

     

    Voilà donc comment tout s’est déroulé. Comme d’habitude. Une « réforme » imposée, dans des buts bien précis, ignorant totalement les pédagogues et les principaux intéressés. Le pire, c’est que des représentants syndicaux ont cautionné cette méthode. Pour quels intérêts ??? Ce que l’on peut néanmoins vous dire, c’est que deux des syndicats signataires, le Snetaa (en 2010) et ID (en 2012) ont rapidement rejoint FO, dont le syndicat de l’éducation était pourtant vent debout contre le bac pro 3…Mais l’essentiel est ailleurs, peut-être du côté des relations peu conflictuelles (c’est un euphémisme !) entre FO et l’IUMM : «  Les 33 accords nationaux de l’IUMM signés, en majorité avec la triplette FO, CFTC et CFE-CGC, ont structuré la politique conventionnelle (NDLR : de la formation professionnelle).» Liaisons sociales (janvier 2008) « Depuis plusieurs décennies, l'UIMM a tissé avec FO, la CGC et la CFTC des relations très étroites » Médiapart (29 juillet 2008) Vous avez dit bizarre !